UN CARACTÈRE SINGULIER DE LA CARAPACE :
Les écailles des tortues présentent parfois des anomalies, soit au niveau de leur forme, soit au niveau de leur nombre. Quand une tortue présente une carapace ayant une fusion ou une division du nombre d’écailles, on parle d’écailles sur/sous numéraires. Dans ce cas, on accuse une température ou une hygrométrie trop élevée pendant l’incubation.
Aujourd’hui, nous savons que l’embryon se développe à un stade très précoce de l’incubation, les écailles sont déjà formées et visibles à 15 jours, ce qui permet d’évaluer d’autres facteurs à risque que l’hygrométrie ou la température lors de cette phase.
Au cours du 2nd cycle, des fluctuations de température ou d’humidité,des perturbations ou des manipulations trop fréquentes, peuvent affecter le résultat de l’éclosion (animaux aveugles, borgnes, membres atrophiés, bec mal formé…) mais plus la formation d’anomalies au niveau des écailles
STATISTIQUES DES ANOMALIES DE DOSSIÈRE ( SPÉCIMENS CAPTIFS ET SAUVAGES) :
Des herpétologistes de terrain comme Andrei STOJANOV* ont relevé un taux d’irrégularité des écailles de 6,7% chez la Testudo hermanni boettgeri et 26.5% de Testudo graeca ibera dans leur lieu de vie sauvage. En incubation artificielle, la revue Radiata (3/2007) rapporte 32% d’anomalies d’écailles chez la Testudo hermanni, 12% pour la Graeca ibera, et seulement 3% pour l’espèce Horsfieldii. Les taux sont donc plus élevés en captivité.
1/THÉORIE DE L’HÉRÉDITÉ :
Ci-dessous, une femelle présentant des écailles en zig-zag de la dossière, qui a donné à plusieurs reprises des descendantes, aucune ne présente ce défaut de carapace. En revanche, un fort pourcentage de géniteurs sans « défaut » produisent des juvéniles avec des sous/surnuméraires.
2/ÉTAT DE SANTÉ DES GÉNITEURS :
Les extravagances d’écaillures peuvent être liées à des conséquences de mauvaise maintenance (besoins vitaminiques et calciques insuffisants des parents) ou de stress lors de la ponte. Gunda Meyer de Rojas, éleveuse allemande et rédactrice de nombreux articles dans des revues chéloniophiles, avance la perspective que des germes peuvent pénétrer plus facilement l’œuf pendant l’incubation si la coquille est trop fine ou poreuse.
3/ENVIRONNEMENT :
Un environnement défavorable comme l’acidité du sol ou des bactéries pourraient être responsables des problèmes d’écailles, pourtant, les spécimens étudiés dans leur biotope proviennent de zones non touchées par la civilisation, où les plantes fourragères sont non traitées et le sol non contaminé. En couveuse artificielle, on utilise de la vermiculite stérile, ce qui exclurait cette thèse, l’hypothèse de températures en dents de scie, en début du cycle, reste un des facteurs déterminants de base.
LE DANGER DE L’ASSOCIATION DE PROBLÈMES SUPPLÉTIFS PLUS SÉRIEUX :
Il est certain que des facteurs tératogènes externes sont aussi responsables des sur/sous nombre ou déformation d’écailles chez les tortues et sont, pour certains cas, la partie visible de l’iceberg qui dissimule d’autres tares plus profondes.
En effet, plus qu’une singularité, cette différence d’écailles est aussi parfois le reflet de problème organique ou osseux plus important, comme la marque concrète d’une anomalie chimique, physique ou biologique.
Ces naissances sont beaucoup plus fragiles, leurs poids est plutôt légers, leurs vivacité est moindre, elles semblent manquer d’autonomie. Pour les cas légers, les sujets vivent sans problème particulier de santé.
Les plus graves déformations ne survivent pas, même avec une attention extrême du propriétaire.
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Asymétrie du plastron et de la dossière, spécimen adulte Boettgeri
ANOMALIES DE PLASTRON :
On dénombre aussi des déformations au niveau des plaques osseuses du plastron, asymétrie de la ligne abdominale, absence ou division des gulaires, cicatrisation béante du sac vitellin… Tous ces cas sont porteurs d’écailles sur/sous numéraires et peuvent présumer,selon l’importance de la malformation, de sérieux problèmes de développement.
Meilleures températures d’incubation conseillées :
Suivant des essais d’incubation par Gunda Meyer de Rojas, les températures les mieux supportées en couveuse artificielle et garantissant les meilleurs résultats pour une progéniture sans défaut d’écailles sont les suivantes :
Jour 1 -10 : 31,5 ° C
Jour 11 – 59 : 33 ° C
Cependant comme expliqué dans cet article, les défauts d’écaillures chez la tortue sont un phénomène multifactoriel et il est illusoire de penser les supprimer définitivement. L’incubation parfaite est un défi pour tous, l’élevage de ces reptiles est un savoir très empirique qui demande temps, patience et observations 🙂
Personnellement, j’incube mes œufs à 30° sans abaissement de la température et sans diapause, je cale les œufs dans de la vermiculite stérilisée sans les enterrer et je mire le moins possible pour éviter de stresser l’embryon, je n’ouvre pas l’incubateur les 15-20 1ers jours. Je n’ai jamais eu de défauts de carapace en suivant ce protocole.
L’étude de Gunda Meyer de Rojas qui m’a aidée à rédiger cet article a été publiée dans la revue allemande « Schildkrötem im Fokus ».
merci à elle pour ces travaux et recherches dans le cadre de son activité d’éleveuse professionnelle.
Pages: 36; Reliure: Broché; Langue: allemand Edition: 1ère édition; Date de sortie: 01.05.2013
*herpétologiste au Musée d’histoire naturelle de Sofia et auteur du livre « Les amphibiens et les reptiles de Bulgarie » (12.01.1958–22.06.2016)
Publié le 20 décembre 2017
